Paradise Papers : les évolutions par rapport aux autres « leaks »

journaliste

Le 5 novembre dernier, un certain nombre de médias (dont le Consortium international des journalistes d’investigation – ICIJ) révélait au grand public les « Paradise Papers ».

Les « Paradise Papers » sont le nom donné à l’enquête journalistique sur une partie de la finance offshore révélée par la fuite (« leak » en anglais) de 13,5 millions de documents (les « Papers ») en provenance notamment de cabinets d’avocats situés dans des pays à fiscalité parfois réduite et souvent exotique (d’où le terme « Paradise »).

Ce n’est pas la première fois qu’une enquête journalistique est ainsi menée sur la base de documents ayant « fuité ». Il y avait déjà eu, entre autres les Panama Papers en 2016, les Swiss Leaks en 2015, ou encore les Luxembourg Leaks en 2014. Précédemment, d’autres types de scandales à caractères fiscaux avaient été révélés, tels que l’affaire UBS dès 2008 aux Etats-Unis.

Il y a toutefois une évolution notable que l’on peut retracer dans ces enquêtes d’un nouveau genre.

D’abord, ce sont des enquêtes purement journalistiques : il semble que l’ICIJ ne veuille pas communiquer les documents qu’il détient à la justice. On peut dès lors se demander s’il y aura effectivement des poursuites judiciaires ou fiscales en France ou ailleurs à la suite de ces « Paradise Papers ».

On sait, à l’inverse, que l’affaire UBS par exemple, a déjà donné lieu à des condamnations et que la banque a été renvoyée en 2017 devant le tribunal correctionnel en France notamment pour fraude fiscale.

Ensuite, la place des « leakers » ou « lanceurs d’alerte » a considérablement évolué. On connaît les noms d’Hervé Falciani à l’origine des « Swiss Leaks », d’Antoine Deltour pour les « Luxembourg Leaks » ou de Bradley Birkenfeld pour le « scandale UBS » aux Etats-Unis ou encore de Stéphanie Gibaud en France. En revanche, les noms des personnes à l’origine des derniers leaks (« Panama Papers » ou « Paradise Papers ») n’ont pas été révélés au grand public.

Est-ce dû au sort réservé aux précédents lanceurs d’alerte et à l’inexistence d’une protection effective de ces personnes ? Certainement.

Enfin, les dernières informations révélées semblent être de moins en moins liées à la fraude fiscale au sens pur et pénal du terme. Certes, les « Paradise Papers » mettent en lumière certaines pratiques relevant certainement de la fraude fiscale. Néanmoins, on y trouve également des mécanismes d’optimisation fiscale parfois mis en œuvre par de grandes entreprises et a priori légaux. La conséquence en est une certaine mise au ban médiatique des pratiques d’optimisation fiscale légale de ces entreprises multinationales.

Sur ce dernier point, il faut rappeler que la responsabilité repose en réalité plus sur les Etats que sur les entreprises elles-mêmes. En effet, on sait bien que la plupart des Etats n’hésitent pas à créer des régimes fiscaux incitatifs pour attirer les entreprises et leurs capitaux sur leur territoire.

S’il faut changer le jeu, c’est d’abord à ceux qui en fixent les règles de commencer.

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